Terre des hommes…
Une cuisse de pintade aux abricots ? Des aiguillettes d'oie au miel et à l'anis ? Un pain à la bière « Fin du Monde » ? Un morceau de fromage Louis d'Or ?... Cela vous ouvre l'appétit ? Ce sont là quelques délicieux produits québécois dignes de se retrouver dans votre assiette. Cependant, ces bonnes choses ne sont pas venues toutes seules.
Par Francine Saint-Laurent
C'est grâce au dur labeur des créateurs de saveurs soucieux de fabriquer des produits destinés à ensorceler vos papilles. Car il faut le dire, les congés sont plutôt rares chez ces semeurs de bonheur.
En somme, leur journée se résume à ceci : se lever à la barre du jour et se coucher tard, afin d'accomplir toutes leurs tâches quotidiennes.
Imaginez ! Il y a même des artisans qui se lèvent au milieu de la nuit pour offrir à leur clientèle du pain fraîchement sorti du fournil. C'est le cas notamment de ceux qui travaillent à la boulangerie-pâtisserie
Le Garde-Manger de François, située à Chambly. Se lever tôt, bien sûr, mais se coucher tard aussi. Au point tel que François Pellerin, l'unique propriétaire de la petite entreprise de « prêt à emporter » a décidé de ne plus compter ses heures.
« Nous devons fabriquer le pain entre minuit et 4 h du matin pour qu'il soit prêt à 6 h, car la boulangerie ouvre ses portes à 7 h. Et mon travail se poursuit après l'heure de fermeture de la boutique. » Toutefois, les efforts de François ne sont pas vains, puisque ses croissants sont considérés comme faisant partie des meilleurs de la Rive-Sud. Ce n'est pas peu dire ! Chez Le Garde-Manger de François, on trouve également de succulentes viennoiseries, des charcuteries, plusieurs variétés de fromages et tant de bonnes choses.
Jean Morin, copropriétaire avec son frère Dominic de la Fromagerie du Presbytère (située à Sainte-Élizabeth-de-Warwick), est un autre lève-tôt. Sa journée commence à 5 h du matin et se termine tard le soir. Malgré tout, notre fromager ne considère pas son travail comme un fardeau; au contraire, il y prend plaisir. « J'adore ce que je fais. Je ne travaille pas, mais je m'amuse, même si je travaille neuf jours sur sept », dit-il en souriant. Beaucoup d'efforts, mais pour quel résultat ! Leur fromage Louis d'Or a remporté les honneurs du Grand Prix des fromages canadiens en 2011.
C'est pour offrir un produit de la plus grande qualité possible à sa clientèle que les Morin ont décidé de participer de A à Z aux étapes de la production. Pour ce faire, Jean Morin se lève à l'heure des poules, car il doit s'occuper de son troupeau de vaches composé de 85 têtes environ.
« Notre troupeau laitier est biologique. Le lait est produit ici et acheminé directement à notre fromagerie », précise-t-il avec fierté.
Nom : Jean Morin
Métier : Fromager
Entreprise : Fromagerie du Presbytère
Défis ou obstacles : Se tailler une place devant les produits importés et faire mieux tous les jours.
Joie : Occuper une profession noble qui consiste à nourrir les gens et recueillir leur sourire.
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Katia Régimbeau, copropriétaire avec Luc Lafrenière de La Ferme L'Oie d'Or, abonde dans le même sens : « S'occuper des animaux exige beaucoup d'organisation. On fait de très longues journées. On se lève aux petites heures pour se coucher tard le soir, sept jours par semaine, pour prendre soin, entre autres choses, des quelques milliers d'oiseaux qu'on élève par année », dit Katia qui rappelle que leurs oiseaux sont élevés d'une manière naturelle. « L'élevage des cailles, des pintades, des canards et des oies se fait sans l'usage de farines animales, d'hormones de croissance et de médicaments. »
Katia consacre également beaucoup de temps à élaborer des produits uniques. « Les visiteurs peuvent se procurer dans notre boutique plus d'une cinquantaine de produits fins transformés ici et qu'on retrouve également dans les supermarchés de la région, comme des rillettes, des terrines, de la mousse de foie gras et de pintade, des saucisses, des tourtières, et plusieurs autres délices. Notre produit vedette est sans contredit le feuilleté de canard pour l'apéro », conclut Katia.
Nom : Katia Régimbeau
Métier : Productrice de volailles
Entreprise : La Ferme L'Oie d'Or
Défis ou obstacles : Payer les frais très élevés engendrés par certains règlements gouvernementaux.
Joie : Quand mes clients reviennent pour me dire que le produit qu'ils ont mangé était bon à se jeter par terre !
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Dominic Charbonneau, brasseur en chef à la microbrasserie Brasseurs du Monde (située à Saint-Hyacinthe), dit que pour créer de nouvelles recettes, cela prend, en effet, un temps énorme. « On doit lire beaucoup et effectuer plusieurs recherches avant de trouver la bonne recette. Il n'est pas rare que je mette mon réveil à 5 h du matin pour passer le plus de temps possible au travail. » Cependant, les efforts de Dominic ont été récompensés.
La preuve ? C'est que cette jeune microbrasserie, ouverte depuis 2011 seulement, a doublé sa capacité de production en l'espace d'une année d'existence. Elle est passée de 20 000 à 40 000 litres par deux semaines de production. Environ une douzaine de leurs produits disponibles sur le marché trouvent preneur grâce à leur goût unique. « Par exemple, la bière Big Ben Porter présente des arômes de chocolat, de noisette et de pain grillé. La bière Saison Tradition a quant à elle un goût très complexe et subtil à cause de ses multiples saveurs divines. »
Nom : Dominic Charbonneau
Métier : Brasseur en chef
Entreprise : Les Brasseurs du Monde
Défis ou obstacles : Arriver toujours au même résultat et au même goût malgré la complexité de la fabrication de la bière.
Joie : Constater la réussite du produit final. Lorsque tous les procédés de fabrication se sont super bien déroulés.
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« On travaille comme des malades, mais on est heureux », dit d'emblée Diane Goyette, pomicultrice et copropriétaire avec Gaétan Gilbert du Verger Le Gros Pierre (situé à Compton). « Nous travaillons également beaucoup pour mettre au point notre gamme de produits. » Diane est particulièrement fière de ses croustilles de pommes. « Ce sont des rondelles faites uniquement de pommes déshydratées, très similaires à des chips. C'est notre produit vedette ! J'ai travaillé très fort sur le goût. De plus, ce produit 100 % québécois est sans sucre, ni huile. »
Même si la saison des pommes est la saison la plus prenante pour Diane – puisqu'elle peut faire de 60 à 70 heures par semaine, surtout lorsqu'elle doit accueillir 2 000 visiteurs dans une seule journée –, elle mentionne que la ferme la tient tout de même très occupée le reste de l'année. « Je n'ai pas le temps de m'ennuyer. Il faut s'occuper de la comptabilité, de l'administration, de l'entretien du verger et d'une multitude d'autres choses. »
Elle dit également préférer les pommiers aux pommes. « C'est l'arbre qu'on nourrit qui nous fournit de bons et gros fruits ».
Nom : Diane Goyette
Métier : Pomicultrice
Entreprise : Verger Le Gros Pierre
Défis ou obstacles : Les caprices de notre climat. Le gel de fleurs de pommiers au printemps, la grêle et l'abondance de pluie pendant l'automne.
Joie : Accueillir 2 000 visiteurs dans une seule journée et les voir, eux et nos employés, heureux. C'est pour moi un moment de grâce.
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Pour Pascale Coutu (copropriétaire avec Pierre Tremblay de La Courgerie, une entreprise située à Sainte-Élisabeth), s'il est vrai qu'il faut ajouter des heures à sa journée quand on exploite une ferme maraîchère, imaginez lorsque celle-ci a une vocation agrotouristique en plus. « Cela nous oblige à travailler deux fois plus fort », dit-elle. En effet, de la mi-août à la mi-novembre, c'est la période où Pascale est au boulot sept jours par semaine. De plus, sa passion pour les cucurbitacées fait en sorte qu'elle doit allonger son horaire, puisqu'elle consacre beaucoup de temps à faire venir des semences de courge et de citrouille d'un peu partout dans le monde. « Songez-y! Ici à La Courgerie, nous possédons plus de trois cents variétés de courges », précise-t-elle non pas sans fierté !
Même si elle doit travailler du matin au soir, Diane affirme en retirer plusieurs compensations. Par exemple, elle aime transmettre aux visiteurs sa passion en leur faisant découvrir de nouvelles variétés de courges et d'autres recettes à base de courge. Ce qui explique en partie le succès de son entreprise.
Nom : Pascale Coutu
Métier : Productrice de courges
Entreprise : La Courgerie
Défis ou obstacles : Quand tout arrive en même temps : le mauvais temps, les travaux et les touristes.
Joie : Voir les enfants se lancer dans des plats cuisinés à base de courge comme si c'était du bonbon. Lorsque des visiteurs me disent qu'ils utilisent mon livre de recettes toutes les semaines.
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Vous avez dit popularité ? Patrick Fournier, qui travaille comme vigneron pour le vignoble Coteau Rougemont, propriété de la famille Robert, en sait quelque chose. Fondé en 2007, le vignoble attire bon an mal an quelques milliers de visiteurs. Il faut dire que ce domaine exceptionnel situé à Rougemont s'est taillé une place fort enviable grâce à la qualité de ses cidres et de ses vins dont quelques-uns ont mérité des médailles, comme la reconnaissance suprême, une médaille GRAND OR pour son cidre de glace « Réserve ».
Cependant, ces récompenses résultent de plusieurs années d'efforts. « Je travaille parfois sept jours par semaine, surtout pendant la période des vendanges. » Sans oublier les nombreux secteurs dont Patrick doit s'occuper, comme l'entretien des vignes, la fabrication des produits, la mise en bouteilles et l'administration. « En somme, les journées se suivent, mais ne se ressemblent pas ! » conclut-il.
Nom : Patrick Fournier
Métier : Vigneron
Entreprise : Le vignoble Coteau Rougemont
Défis ou obstacles : Découvrir davantage les goûts de la clientèle. Élaborer des produits qui se démarquent des autres. Apprendre à transformer en atouts les difficultés du travail dans un climat nordique.
Joie : Goûter le vin du vignoble et être satisfait du résultat final. Sortir le matin et admirer le magnifique paysage qui se dresse devant moi.
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L'entreprise du Domaine Leduc-Piedimonte et Cidrerie McKeown est également située à Rougemont. Robert McKeown, copropriétaire avec Andrée Saint-Denis, raconte qu'au départ il rêvait de s'acheter un vignoble, comme projet de retraite. Il est dans la jeune trentaine lorsqu'il achète un grand champ de pommiers en 2004. « J'ai finalement décidé de conserver les pommiers plutôt que de les arracher pour les remplacer par des vignes. » Une décision qui a porté ses fruits… puisque sa cidrerie jouit, à l'heure actuelle, d'une solide réputation. Ce qui n'était au départ qu'un simple loisir est devenu pour lui une véritable passion. « J'étais en marketing et j'ai décidé de tout abandonner pour me consacrer entièrement à mon passe-temps. » Cidre de glace, cidre de glace Réserve Privée et cidre pétillant McKeown, nos jeunes entrepreneurs exportent à présent leurs produits au Japon, en Espagne, en Angleterre, en Suède et dans plusieurs autres pays. Leur projet ne s'arrête pas là : ils ouvriront d'ici peu une boutique. Ce qui aura pour effet d'augmenter l'achalandage à longueur d'année. Et ce n'est pas tout, ils songent à acquérir de nouvelles terres pour doubler le nombre de leurs pommiers, c'est-à-dire de 3 000 à 6 000 arbres. Rien de moins !
Nom : Robert McKeown
Métier : Cidriculteur
Entreprise : Domaine Leduc-Piedimonte et Cidrerie McKeown
Défis ou obstacles : Faire connaître davantage le bon goût du cidre à la clientèle. Maintenir le bon goût et la qualité du produit malgré les nombreuses difficultés qui peuvent survenir dans la production.
Joie : Quand on a beaucoup de commandes à livrer.
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